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C’est en fréquentant les secteurs social et médicosocial, puis celui de l’Éducation Nationale, majoritairement dans les départements du Puy-de-Dôme et de l’Allier, que mon activité professionnelle d’aujourd’hui trouve sa genèse.

J’ai souvent croisé des jeunes qui n’avaient tout simplement pas les mots ! Les mots pour faire part de leurs émotions et sentiments négatifs ou même positifs, les mots pour exprimer une colère parfois légitime qui ne fait qu’exiger le respect ou réclamer justice, ou tout simplement les mots pour témoigner de qui l’on est et ce que l’on souhaite.

Et on le sait bien, lorsque l’être ne trouve pas le chemin du langage pour se dire et oser être, il s’engage bien souvent sur les voies du mutisme ou de la violence.

Mutisme et violence disent évidemment quelque chose de soi, même si peu de personnes sont en mesure de l’entendre. Mais tout en disant finalement assez peu de l’être, ces attitudes prennent en revanche exagérément beaucoup de lui, parce qu’elles le condamnent, l’enferment dans la culpabilité, dans le dégout de soi.

Puisqu’ils n’ont pas les mots, il faut donc les leur apporter et qu’ils se les approprient afin de les utiliser pour se faire entendre. Bien entendu, c’est le rôle des parents et des éducateurs d’aider et de guider ces jeunes dans leur quête de sens et dans leur besoin et leur désir de trouver le bon mot qui, parce qu’il rendra fidèlement compte de leur vérité, libèrera.

Mais je pense sincèrement que s’il y a un lieu par excellence où l’on peut acquérir ce langage qui nous permet de nous faire entendre et comprendre, ce doit être l’école. À l’école, on apprend non seulement des savoirs, mais aussi des savoir-faire et surtout des savoir-être, essentiels pour la suite de notre existence.

C’est pour cette raison, qu’en tant qu’éducatrice, j’attachais une importance toute particulière à la scolarité des jeunes sous ma responsabilité. J’avais en effet l’intuition profonde que si ces jeunes avaient une chance d’entamer un parcours de résilience, c’était principalement en fréquentant assidument l’école et en se rendant compte qu’ils aimaient apprendre et acquérir des connaissances et particulièrement que ces savoirs leur apportaient les prémices prometteuses de réponses à leurs questions existentielles et de ce fait un début de compréhension, d’apaisement et de contrôle sur les pensées et attitudes régulièrement autodestructrices qui les traversaient. Ne dit-on pas justement que « le Savoir c’est le Pouvoir » ?

Bien sûr, l’école ne fait pas tout. Mais pour certains enfants, elle est pratiquement le seul lieu où ils peuvent avoir accès à cette culture commune si chère à l’école de la République, et qui se veut l’un des facteurs principaux d’intégration. Il appartient donc à l’école de faire tout son possible pour offrir les mêmes chances de réussite à ces enfants, aussi indépendamment que possible des cartes qui leur ont été distribuées à la naissance.

C’est donc tout naturellement que j’ai un jour pris la décision de venir faire un tour du côté de l’Éducation Nationale. Je n’avais pas nécessairement le désir de devenir enseignante, car j’aimais mon métier d’éducatrice spécialisée. Mais j’avais envie de connaitre de plus près ce milieu, ce qu’il s’y passait, indépendamment des représentations que je m’en faisais. J’ai donc repris mes études et j’ai obtenu mon Master MEEF 1er degré : Métiers de l’enseignement, de l’Éducation et de la Formation pour enseigner dans le premier degré (enseignement primaire). Ces deux années de Master et surtout les stages que l’on nous propose ont été une révélation pour moi. Ils m’ont permis de confirmer ce besoin d’être dans la transmission de savoirs, me permettant de viser l’autonomie de mes élèves ; cette autonomie, cette indépendance et cette liberté si chère à mes yeux et que je leur souhaitais tout autant.

Pour autant, est-ce que j’avais envie d’appartenir à cette énorme machine que semble être l’Éducation Nationale ? J’étais loin d’en être certaine.

J’ai rencontré d’excellents enseignants, qui aimaient leur travail et le faisaient vraiment bien. Mais le discours des enseignants en général sur les conditions de plus en plus difficiles d’exercice de leur métier laisse entrevoir un certain nombre d’obstacles à la tenue des promesses faites par l’École de la République : surcharge des classes et de ce fait manque de temps pour accompagner efficacement chaque élève selon ses besoins spécifiques, manque de formation sur différents troubles et problématiques afin d’être en mesure d’accueillir convenablement un enfant porteur de handicap.

Toutefois, j’avais ce désir de garder un pied dans l’enseignement, d’une manière ou d’une autre, et je sentais que j’avais les compétences nécessaires et le gout pour cela. C’est de ce désir qu’est né ma démarche professionnelle d’aujourd’hui.